Fiche thématique
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16 novembre 2022
Gérer un fonds de commerce n’est pas chose facile. Entre les ventes, l’accueil de la clientèle, la gestion des stocks ou la comptabilité, les propriétaires peuvent préférer confier ces fonctions à une tierce personne par la conclusion d’un contrat de location-gérance.

Sommaire

Qu’est-ce que la location-gérance ?

Le contrat de location-gérance permet au propriétaire d’un fonds de commerce ou d’un établissement artisanal de ne pas l’exploiter lui-même. Il concède à un tiers, le locataire-gérant, le droit d’exploiter le fonds librement à ses risques et périls, moyennant le paiement d’une redevance. Il ne faut pas la confondre avec le bail commercial qui, lui, est un contrat de location immobilière.

C’est un contrat d’intérêt commun et l’intérêt pour le propriétaire du fonds est d’en conserver la propriété tout en s’abstenant d’en assurer lui-même la gestion, qu’il confie à ce tiers ayant des qualités de gestionnaire. Il maintient donc l’exploitation et perçoit un revenu au travers des redevances.

Le locataire-gérant, quant à lui, exploite le fonds pour son compte sans avoir à réaliser d’investissement lourd (acquisition des locaux, clientèle, droit au bail, etc.). S’il envisage à terme de reprendre l’entreprise, cela lui permet d’évaluer auparavant la rentabilité du fonds de commerce.

Quelles sont les conditions préalables à la conclusion du contrat ?

Pour le propriétaire du fonds de commerce

Le recours à la location-gérance était soumis à la condition d’une exploitation préalable du fonds de commerce durant deux années (et avant 2004, la durée exigée était de 7 ans), à peine de nullité du contrat. La loi de simplification du droit des sociétés du 19 juillet 2019 a supprimé cette condition d’exploitation préalable.

Pour le locataire-gérant

Il doit s’immatriculer au Registre du commerce et des sociétés (RCS), ou au Répertoire des métiers s’il est artisan (ce répertoire est remplacé le 1er janvier 2023 par le Registre national des entreprises), le locataire-gérant doit avoir la qualité de commerçant (C. com., art. L. 144-2 ).

Remarque

Pour avoir la qualité de commerçant, il faut être majeur et ne faire l’objet d’aucune incompatibilité (ex. : l’exercice d’une activité de fonctionnaire ou d’avocat), ni interdiction d’exercer la profession commerciale (notamment à la suite d’une faillite personnelle ou d’autres condamnations).

Le locataire-gérant doit respecter ses obligations comptables et s’engager à ne pas modifier l’activité du fonds de commerce qui lui est confié.

Comment s’exécute le contrat de location-gérance ?

Une publicité à respecter

Dans la mesure où la conclusion du contrat de location-gérance implique un grand changement de la personne à la tête du fonds de commerce, il faut en avertir les tiers. Lors de la conclusion et de la rupture du contrat, un avis doit être publié dans les quinze jours de l’événement dans un support habilité à recevoir des annonces légales (C. com., art. R. 144-1 ). Cette formalité permet de faire en sorte que les dettes soient réparties entre les deux parties : pendant la durée du contrat, c’est le locataire-gérant qui en assume la responsabilité, en dehors de cette durée, c’est le propriétaire du fonds de commerce qui en est responsable.

Toutefois, entre la signature du contrat de location gérance et sa publication, le loueur du fonds est solidairement responsable avec le locataire-gérant des dettes contractées par celui-ci à l’occasion de l’exploitation du fonds (C. com., art. L. 144-7 ).

Remarque

Parallèlement, le propriétaire d’un fonds de commerce est solidairement responsable avec l’exploitant (ici le locataire-gérant) des impôts directs établis à raison de l’exploitation de ce fonds jusqu’à la publication du contrat.

La durée du contrat

Le contrat de location-gérance est en pratique souvent conclu à durée déterminée, pour un an renouvelable par tacite reconduction. Le contrat peut aussi prévoir une durée indéterminée.

Quelles sont les obligations et responsabilités des parties ?

A la charge du propriétaire du fonds de commerce

Comme dans tout contrat de bail classique, le propriétaire a une obligation de délivrance, il doit mettre les lieux à disposition du locataire (C. civ., art. 1719 ) et réaliser les éventuels travaux de conformité aux normes de sécurité et d’hygiène, afin que le fonds puisse être en état de servir à l’usage pour lequel il a été loué. En pratique, il s’agit des grosses réparations.

Remarque

La crise sanitaire due à la pandémie de Covid-19 a conduit de nombreux locataires-gérants à devoir cesser temporairement leur activité. On a pu se demander si le loueur ne manquait pas à son obligation de délivrance. La Cour de cassation, en matière de baux commerciaux, a répondu par la négative.

Le loueur ne doit pas s’immiscer dans la gestion du fonds de commerce de son locataire-gérant. Mais surtout, il ne doit pas lui faire concurrence et ne pas se réinstaller dans la même zone de chalandise. En revanche, le bailleur n’est pas tenu de garantir le preneur du trouble que pourraient lui apporter des tiers, y compris les concurrents. En outre, s’il était immatriculé au RCS avant la mise en location-gérance, le loueur doit procéder à sa radiation.

A la charge du locataire-gérant

Le locataire-gérant doit exploiter le fonds de commerce sans en modifier l’activité, c’est-à-dire conformément à sa destination : il ne peut donc pas modifier l’activité du fonds ou en adjoindre une nouvelle.

Le locataire-gérant doit exploiter le fonds de façon à éviter qu’il ne perde de sa valeur : le commerce ne doit pas péricliter et ne doit pas perdre de clientèle. Le locataire-gérant doit ainsi assurer une exploitation continue et régulière du fonds grâce à une gestion « raisonnable » (et non plus en « bon père de famille ») qui garantit la bonne exécution du contrat ; il ne doit donc rien faire qui nuise au maintien de la clientèle ou de l’achalandage.

Afin de pouvoir rendre le fonds de commerce en bon état lors de la fin du contrat, le locataire-gérant doit aussi en prendre soin et entretenir les locaux.

Le locataire-gérant doit bien sûr respecter l’ensemble des dispositions du contrat, notamment la clause de non-concurrence qui limite ses possibilités d’exploiter un fonds concurrent après la fin du contrat, ainsi que le paiement de la redevance qui fonde sa possibilité d’exploiter le fonds de commerce.

Le régime des redevances

Montant, fixation

Le locataire-gérant doit verser au propriétaire du fonds, les redevances prévues au contrat, redevances qui sont librement convenues entre les parties, et qui peuvent être fixes ou proportionnelles au chiffre d’affaires réalisé.

Le contrat peut encore prévoir une clause d’indexation, le loyer pourra alors être révisé (C. com., art. L. 144-11 ). La périodicité de leur versement peut être mensuelle ou trimestrielle.

Régime fiscal

Pour le locataire-gérant, les redevances représentent des charges déductibles de son résultat imposable. Elles sont par ailleurs soumises à la TVA.

Pour le propriétaire du fonds de commerce, les redevances sont des bénéfices d’exploitation, imposables dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux (BIC).

La fin du contrat de location-gérance

Le locataire-gérant doit restituer le fonds de commerce dans l’état où il se trouvait lors de la conclusion du contrat de location-gérance. Si le contrat était à durée déterminée, la résiliation de la location-gérance vient avec l’arrivée du terme prévu. Si le contrat était à durée indéterminée, chacune des deux parties est libre d’y mettre fin en respectant l’éventuel délai de préavis.

En ce qui concerne les contrats de travail, lorsqu’ils sont en cours à la fin du contrat de location-gérance, les contrats de travail subsistent et sont transmis au propriétaire du fonds, ce qui permet d’assurer aux salariés la stabilité de leur emploi, dès lors que l’entreprise est continuée. Le propriétaire du fonds récupère donc le fonds et avec lui les contrats de travail passés par le locataire-gérant, sauf si le fonds est devenu inexploitable au jour de sa restitution. La fin de la location-gérance rend immédiatement exigibles les dettes afférentes à l’exploitation du fonds ou de l’établissement artisanal, contractées par le locataire-gérant pendant la durée de la gérance (C. com., art. 144-9 ). La fin de la location-gérance nécessite, comme pour son début, l’accomplissement des formalités de publicité.

Valorisation du fonds et indemnité de plus-value

A la fin du contrat, si une perte de valeur est survenue par la faute du locataire-gérant, il devra en répondre auprès du propriétaire. Si au contraire, le fonds a pris de la valeur grâce à l’exploitant, il peut prétendre à une indemnité de plus-value. Celle-ci n’a cependant rien à voir avec l’indemnité d’éviction prévue en matière de baux commerciaux. L’indemnité de plus-value n’est notamment due que si les améliorations ont été apportées avec l’accord du propriétaire du fonds.

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