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6 février 2023
L’absence de mise à jour du système informatique de l’opérateur, à la suite d’un changement de régime douanier des marchandises importées, ne constitue pas une situation particulière au sens de l’article 239 du CDC, justifiant la remise ou le remboursement des droits de douane acquittés sur ces marchandises.

En l’espèce, une société qui fabrique et commercialise des médicaments a obtenu en 2008 le statut d’exportateur agréé pour l’exportation de marchandises communautaires. En décembre 2014, elle a mis en libre pratique en Allemagne de la marchandise importée des États-Unis, marchandise sur laquelle des droits de douane ont été perçus. Dans le même temps, elle a introduit une demande d’utilisation du régime du perfectionnement actif afin de transformer des marchandises importées dans l’Union.

Pour mémoire, l’utilisation du régime du perfectionnement actif permet d’introduire sur le territoire douanier de l’Union des marchandises de statut tiers sans qu’elles soient soumises aux droits à l’importation ou aux mesures de politique commerciale.

Cette autorisation lui a été délivrée avec effet rétroactif au 1er décembre 2014, si bien que les droits initialement perçus sur la marchandise importée des États-Unis lui ont été remboursés. L’autorisation prévoyait que les produits issus de la transformation devaient être présentés au bureau de douane et réexportés hors de l’Union européenne en indiquant un code spécifique sur la déclaration en douane ou faire l’objet d’une autre destination douanière.

Toutefois, les informations figurant dans le système informatique de la société n’ayant pas été mises à jour suite à la délivrance de l’autorisation de perfectionnement actif, la marchandise préalablement importée et les produits compensateurs en résultant ont été exportés en tant que marchandise communautaire et non en tant que marchandises placées sous régime du perfectionnement actif. En raison de cette erreur initiale, la société ne s’est pas conformée aux prescriptions figurant dans son autorisation de perfectionnement actif lors de l’exportation : le code spécifique n’a pas été indiqué et la marchandise n’a pas été présentée au bureau de douane.

Considérant que ces marchandises avaient ainsi été soustraites à la surveillance douanière, le bureau de douane leur a appliqué les droits de douane dus à l’importation.

Estimant se trouver dans une situation particulière au sens de l’article 239 du code des douanes communautaire (CDC) eu égard à la complexité de la réglementation applicable, la société a demandé le remboursement de ces droits. Celui-ci lui a été refusé.

C’est dans ces conditions que la Cour est amenée à se prononcer sur l’existence d’une situation particulière au cas d’espèce.

Pour y répondre, la Cour rappelle que l’article 239 du CDC constitue une clause d’équité impliquant la remise des droits de douane lorsque deux conditions sont réunies : le redevable se trouve dans une situation particulière et il n’a par ailleurs commis ni négligence ni manœuvre (CJUE, 29 juill. 2019, aff. C-589/17, Prenatal).

De jurisprudence constante, la Cour considère que l’existence d’une situation particulière suppose que le redevable se trouve dans une situation exceptionnelle par rapport aux autres opérateurs du secteur concerné.

Le simple fait que les marchandises préalablement importées, transformées ou non par la suite, aient été réexportées vers un pays tiers et n’aient pas été introduites dans le circuit économique de l’Union n’est pas susceptible de démontrer que cet opérateur se trouvait dans une situation exceptionnelle par rapport aux autres opérateurs exerçant la même activité.

Par ailleurs, s’agissant de la complexité de la réglementation en cause, susceptible de constituer une situation particulière, la Cour relève qu’aucun élément concret n’a été porté à sa connaissance.

Elle constate en outre que les marchandises ont certes été dans un premier temps mises en libre pratique puis placées sous le régime du perfectionnement actif avec effet rétroactif mais que cette modification a été faite à la demande de l’opérateur et qu’à la suite de celle-ci un seul régime douanier était applicable aux marchandises.

Enfin, le fait que la société n’ait pas modifié les données figurant dans son système informatique à la suite du changement de régime douanier des marchandises en cause ne saurait pas non plus constituer une situation particulière au sens de l’article 239 du CDC.

Cette absence de mise à jour, à l’origine de l’erreur commise ensuite lors de la réexportation des marchandises, est imputable à la société elle-même et relève du risque commercial que doit supporter tout opérateur économique.

En outre, pour éviter l’erreur commise lors de l’exportation des marchandises concernées, il aurait simplement suffi que la société respecte les conditions figurant dans son autorisation de perfectionnement actif.

La Cour en conclut qu’il n’existe, au cas d’espèce, aucune situation particulière justifiant la remise ou le remboursement des droits de douane.

Remarque

la rédaction de l’article 120 du code des douanes de l’Union (CDU) étant similaire à celle de l’article 239 du CDC, l’appréciation de la Cour reste valable pour l’application de celui-ci.

Aimée Kleiman, Avocate au Barreau de Paris, collaboratrice du cabinet Vigo, membre du réseau international d’avocats GESICA
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